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Marie Labat

 

Artiste plasticienne née en 1983, je vis à Lys (Pyrénées Atlantique).

Marie Labat

L’espace rural est le lieu d'une relation fondamentale entre nous et la nature, la terre et le vivant. Notre nature révèle notre culture. Nos comportements disent beaucoup sur notre humanité. Nous évoluons sur un territoire, élaborons les conditions matérielles, intellectuelles afin de former un environnement propre. Notre existence passe par le développement d’activités qui modifie notre milieu. Nous prenons le contrôle, avec des outils et objets qui appliquent un modelage du "paysage" à notre image. Un pouvoir de l’Homme sur le vivant, mais celui-ci exprime, à travers ça, sa propre condition humaine. Quand les nouvelles formes de connaissances et de maitrises de la nature s’opèrent, alors la culture et les contextes sociaux sont en mouvement. 

 

Marie Labat est une artiste du monde rural. Elle a décidé d’exploiter la ferme familiale. C’est une préférence de vie mais également un choix artistique. Ce choix traduit un attachement fort aux paysages, aux espaces, aux formes du quotidien comme un lien transparent entre la nature et l’animal ; une liberté instinctive. Si la terre lui transmet un certain nombre de savoir, forme d’éducation à la nature, le contrôle et la maitrise des espaces naturels, toujours plus important, est un véritable asservissement. L’espace de liberté exprime alors l'oppression. C’est cela que l’artiste cherche à évoquer dans son travail. Comment les contextes sociaux, culturels et l’humanité s’organisent autour de son rapport à la nature, dans une dualité et un combat permanent entre la violence qui s’opère dans la maitrise et la servitude et les nouvelles conceptions des engagements qui s’organisent pour résister. L’artiste est dans le désir incessant de comprendre comment l'humanité s’exprime dans les espaces naturels que nous investissons.

En détournant le territoire de campagne, ses objets, son paysage en mutation et ses formes en déplacement elle crée des nouvelles images où notre rapport à la nature évoque notre culture. La création est une forme à lire. Il faut déchiffrer les matériaux ou les images faites de motifs hybridés chargés de multiples références qu’elle compose pour déplacer les consciences et organiser un nouveau cheminement de la pensée. Les oeuvres de l’artistes se composent dans des assemblages d’idées, des associations de fragments aussi bien de paysage, de nature, de figures que de propos intellectuels, comme un jardin en pousse, des parties pour faire un tout. Les oeuvres ont des formes légères, ludiques, montrant du doigt notre infantilisation. Elles contrastent avec les matériaux et les images qui les composent. Le spectateur est piégé. Il doit alors désapprendre ce qu’il vient de voir, tenter une nouvelle lecture, en cela il s’ouvre à une autre compréhension du monde, porte un regard sur notre état, nuance sa conception des choses. Les travaux de Marie Labat abordent la sculpture par le détournement et l’assemblage, le dessin numérique avec des impressions sur tissu, la peinture sur différents supports ou la vidéo. Souvent, elle organise des rencontres entre ses différentes pratiques sous la forme d’installation pouvant être interactive. Les oeuvres de l’artiste peuvent être des petites productions comme des oeuvres monumentales où il est important d’intégrer le lieu et le paysage comme objet artistique. Elle aime imaginer des espaces d’exposition qui agissent et interagissent avec les lieux d’inspiration, le quotidien.

Sa proposition plastique :  « Fontaine de lait » et « Les grasses »

Fontaine de lait,

bois, peinture, abreuvoirs, plâtre, cornes, 4 m

de hauteur et 3 m / 2 m de largeur, 2017.

La forme de la structure fait écho aux montagnes. Comme une grotte, l’entre se visite. Le spectateur pénètre dans un espace rectangulaire fait d’ouvertures bouchées. Un espace de contention, rappelant des cages pour animaux. Sur la paroi un dessin, il présente une hybridation de motifs, objets et sculptures. Deux robinets sont placés symétriquement comme des seins de part et d’autre du dessin. D’eux coule une masse blanche figée. Des abreuvoirs pour veau dessinent une fontaine dans laquelle la coulure blanche se répand. Sur la partie extérieur de la grotte, les reliefs présentent l’idée d’un monde aux lignes droites , aux lignes maitrisées.

Le plus vieux mythe du monde raconte que les hommes pensaient sortir, avec les animaux, du centre de la terre par une grotte. Elle était le symbole de la vie comparable à une mère. Pour les archéologues, la grotte avait une part mystique et les dessins présents étaient des évocations de la vie et de son pouvoir. Dans la grotte la masse blanche symbolise le lait. Il coule, dans des abreuvoirs pour veau, comme de l’eau dans une fontaine, une référence à la source du jardin d’Éden. Le lait est un symbole de l’amour maternel. Il s’agit d’un  hommage à la fertilité, à la vie, à l’amour et une dénonciation de notre industrialisation de la vie; mais aussi un questionnement sur notre ressemblance zoologique, comme le concevaient les hommes préhistoriques. 

Les grasses, 

dessin numérique , impression sur tissu, bois, pierres 137/250 cm et 130 cm de diamètre.2017

L’installation s’appuie sur les aménagements d’intérieurs nomade et sédentaire. Ils se font face entre un store et un feu. La représentation graphique et sculpturale fait référence à la mythologie Grecque, à une tribu isolée d’Amazonie et aux bâtiments industriels agricoles. 

Après un travail graphique numérique, les dessins sont imprimés sur tissu. Le store et le feu sont pensés comme des éléments décoratif et d’ameublement. Des dessins de bâtiments agricoles industriels et des guerriers d’Amazonie sont travaillés comme un motif de toile de Jouy. La toile ainsi composée est suspendue au mur d’un bâtiment agricole et la seconde est posée au sol entourée de pierres. Pour le store, au centre trois femmes volent sur une balançoire, portées par un avion, une référence aux trois Grâces. Pour l’antique, elles sont le symbole de la vie. Elles se balancent sur les trainées de la fumée des avions. Les trois Grâces ne sont plus dans les jardins, elles sont portées dans les airs, symbole d’un monde en lévitation, en vole, qui n’a plus les pieds sur terre. Pour le feu, sont représentés deux hommes d’une tribu d’Amazonie dans une végétation luxuriante, travaillé comme un motif.

L’avion, symbole de la mondialisation, est également représenté comme une arme autour du store. Cela rappel la découverte, par un avion qui les survole, d’une tribu isolée d’Amazonie. J’imagine qu’elle se serait appropriée l’avion, objet menaçant, comme un symbole de puissance pour terrifier l’ennemie. Le lien avec les bâtiments agricoles vient du fait que l’agriculture intensive menace les territoires des tropiques, pour une culture intensive, alimentation des élevages hors sol, de plus en plus important.

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